Vue aérienne du Casteddu de Cucuruzzu
Au premier plan la torra et en contre bas les loges encastrées dans la muraille
Au premier plan la torra et en contre bas les loges encastrées dans la muraille
casteddu de cucuruzzu
Le casteddu de Cucuruzzu fait figure de forteresse, protégeant une zone de village qui occupait le reste de l’éperon rocheux. L’unique entrée se fait par un couloir en chicane formé entre deux boules de granite, ce qui la rend facilement défendable. À l'intérieur, se trouvent des loges destinées aux activités artisanales, des diverticules pour le stockage des denrées, des cuvettes et des cupules utilisées pour le broyage des céréales, comme le montrent les vestiges retrouvés lors des fouilles et exposés au musée de Levie.
Les aménagements de l’enceinte ouest peuvent faire office de guérites, présentant des ouvertures étroites comparables à des meurtrières. Comme dans les autres casteddi de ce type, l’ensemble est dominé par une construction circulaire de grandes dimensions, la torra. Ici, elle est conservée sur 4 à 5 m de haut et devait probablement comporter un étage supplémentaire. S’ouvrant sur les aiguilles de Bavella, elle présente un couloir flanqué de renfoncements, menant à une pièce principale dotée d’un espace annexe. Roger Grosjean a interprété la torra comme un monument cultuel, mais la similitude avec les nuraghe du nord de la Sardaigne laisse penser qu’elle devait servir de lieu de stockage et de préservation des biens et des ressources alimentaires de la tribu. Sa position au point culminant du site en fait également un édifice défensif ou d’observation offrant une large vue sur les alentours.
Casteddu d'Araghju
Situé sur le territoire de la commune de San Gavino di Carbini, le casteddu d’Araghju est un autre exemple caractéristique des préoccupations sécuritaires qui président à l’édification de ce genre de monuments. Accessible après une ascension d’une vingtaine de minutes, il offre une vue magnifique sur le golfe de Porto-Vecchio. Position stratégique ; épaisseur des murailles (près de 4 m de haut et 2 m de large par endroits) ; présence au sommet de l’enceinte d’un possible chemin de ronde ; espaces faisant office de corps de garde (partie orientale) : autant d’éléments qui attestent de la vocation défensive de l’édifice. On peut diviser l’ensemble en trois éléments. Incorporée au sud de l’enceinte, on retrouve les restes d’une torra qui occupe encore une fois le point culminant du site. Dans la partie opposée de l’enceinte, les épaisses murailles intègrent des espaces habitables, et donnent accès au niveau supérieur par un escalier abrupt (photo ci-contre).
À l’est, à côté de l’entrée monumentale, dans la partie la plus imposante de la muraille, se trouve une pièce avec foyer central que l’on considère comme un corps de garde. Par ailleurs, le site a connu des réaménagements au long de la période où il a été occupé, l’un d’eux conduisant notamment à obturer, dans la partie nord de l’enceinte, une entrée peut-être moins facilement défendable, et à la transformer en archère.
À la différence d’autres casteddi, les fouilles n’ont pas révélé dans celui d’Araghju de structuration de l’espace interne. Il pourrait alors s’agir d’un lieu seulement occupé par des gardiens ou par les chefs de la communauté, et pouvant servir de refuge lors de conflits, pour accueillir animaux et hommes vivant en contrebas. Les fouilles archéologiques n’ont jusqu’à présent livré qu’un témoignage assez pauvre des activités quotidiennes liées au site : éléments de meunerie, poteries destinées au stockage ou à la conservation des aliments, etc. Dominant souvent de vastes zones cultivables, les casteddi servent ainsi généralement, tout à la fois de refuge et de grenier à blé, et témoignent de l’évolution des modes de vie à l’âge du bronze
Casteddu de volta - sevi sorru cruzzini cinarca
Au IIIe siècle avant Jésus-Christ, Rome conquiert la Corse par la force. Bien que les grandes étapes de cette guerre et de la colonisation qui en découle soient connues par les textes anciens, bien peu de traces matérielles ont été mises en évidence et étudiées à ce jour. La vallée de la Sagone conserve pourtant un témoignage majeur de cette période : le castellu de Volta. Le site, inventorié dans la carte archéologique nationale, comporte une vaste fortification construite sur les hauteurs, à 530 m d’altitude, constituée d’une longue enceinte en pierre sèche de plusieurs mètres d’épaisseur par endroit. À l’intérieur, plusieurs structures rectangulaires sont encore reconnaissables, il s’agit d’habitations construites en pierre sèche, et originellement couvertes de grosses tuiles à crochets (tegulae). La fonction de cette forteresse était certainement stratégique. Comme par exemple avec les vallées de Sagone et de Paomia, alors que sa position élevée permet de surveiller une très longue portion de côte. Par ailleurs, le choix de son implantation n’est peut-être pas indifférent aux richesses naturelles offertes par cette microrégion et notamment aux minerais (fer, cuivre, plomb, argent, étain…) et aux vastes forêts de pins Lariccio, de sapins et de hêtres pouvant faire l’objet d’une exploitation. Quoiqu’il en soit, cette conquête romaine marque le début d’un extraordinaire développement des échanges avec l’extérieur. On assiste ainsi à un déplacement des habitats vers le littoral et, avec eux, les petits mouillages naturels, dispersés tout le long de la côte, vont rapidement se développer.